Le Brexit sous un autre angle. Le libéralisme : tout à voir avec le droit, rien à voir avec l’économie. – la vidéo qui termine l’article vaut son pesant de cacahuètes.

Le Gouvernement Britannique est convaincu, … si l’on excepte l’idée que le Ministre du Brexit et la Ministre de l’Irlande du Nord ont démissionné. Ça reste pas mal. Reste à convaincre le Parlement. Et après ? Trois fois rien : il n’y aura plus qu’à convaincre les 27 dirigeants de l’UE. Pur ceux qui ont un peu de mémoire à propos de l’info précédente sur ce sujet : en l’absence de résultats « suffisants » dans les négos UE-UK, le sommet européen spécial prévu en novembre pour signer le deal final n’aura pas lieu (AFP – 07/11).

Pronostic à court terme:au sein de son parti, les partisans du hard Brexit vont rejeter ce deal jugé trop favorable à l’Union Européenne. À l’extrême, les anti Brexit vont aussi s’y opposer pour tenter d’obtenir un 2ème référendum. E chi losa ? Personne. Affaire à suivre.

C’est l’occasion de se pencher sur quelques fondamentaux, en ce compris philosophiques.

La doctrine libérale, on l’oublie souvent, n’a rien à voir avec l’économie, mais tout à voir avec le droit.

Le libéralisme est né avec John Locke, philosophe britannique qui a posé comme condition préalable au bonheur des peuples, l’idée, liée à la rédaction de la « magna carta », que :

  1. La propriété privée doit être absolue
  2. Tout le monde doit être à égalité face à la Loi, y compris l’état

Historiquement, la moitié des philosophes libéraux sont français, issus donc de ce pays où les gens adorent les idées, parfois bien plus que la réalité, ce qui fait à la fois le charme et parfois la faiblesse de ce peuple.

Mais malgré Montesquieu, Rabelais ou, surtout, Michel Montaigne, la France a un droit « administratif » fort, c’est-à-dire qu’en France et dans nombre de pays fortement influencés par elle, il n’y a pas un mais deux droits.

Cela signifie que, face à l’état, le particulier est appelé à être d’entrée de jeu à se trouver en état d’infériorité face à l’état. En Angleterre, la Reine va devant le même Tribunal que ses citoyens, le « Procureur » est un avocat qui, ce jour-là, défend l’état. Rien de tel n’existe, ni de près ni de loin sur le Continent.

La France n’est pas un état libéral, la Belgique non plus : ce sont des pays « asymétriques », des pays où l’état, et ses serviteurs ont plus de droit que les particuliers et où, dès lors, la propriété privée peut se trouver fragilisée. Ce ne sont pas des pays « libéraux » et, répétons-le, ceci n’a rien à voir avec l’économie et tout avec le droit.

La monnaie dépend de l’état. Elle est émise par lui. Lorsque Jesus dit aux pharisiens (qui lui demandent s’il faut payer ses impôts) : « rendez à César ce qui est à César », Jésus ne fait rien d’autre que de constater que la monnaie est émise par César (il y a d’ailleurs sa tête sur chaque sesterce) et qu’elle relève de lui. Autrement dit, la séparation de l’église et de l’état dans les pays chrétiens vient de cette phrase, unique.

Or, derrière l’idée de la légitimité de l’état, il y a l’idée de l’impôt et l’idée que la démocratie permet, au travers de la Loi pour laquelle il faut voter, de contrôler l’état : cela signifie que les personnes admettent le monopole de l’état car il est sensé être soumis à la Loi, sur laquelle ils votent et c’est ce qui fait qu’ils seront d’accord de payer des impôts. La boucle est sensée être bouclée.

Cet enchaînement arrive à se poser la question de savoir qui vote, c’est-à-dire qui constitue la nation ? La définition, selon la définition française, « c’est un peuple qui souhaite vivre ensembles et se réfère à un passé commun. Un français peut être quelqu’un qui se sent et qui a envie de se sentir français. C’est ce que Monsieur Zemmour essaie de dire à longueur de journée (et on l’en empêche, ce qui, personnellement, me paraît bizarre, surtout de la part de gens qui se prétendent partisans de la liberté d’opinion).

La monnaie est donc, en quelque sorte, l’envers d’une nation, une des formes que prend son expression d’une volonté de vivre ensemble.

Certaines nations sont très bien organisées pour vivre ensembles, d’autre l’étant moins.

Tout ceci pour dire qu’une monnaie est un peu plus, contrairement à l’idée communément répandue, qu’un simple « moyen » sur lequel les gens se mettent d’accord pour mesurer la valeur des échanges : cette valeur n’a d’asssise que parce que ces gens se mettent d’accord parce qu’ils partagent un projet commun, qui rejoint, peu ou prou, l’idée de nation (qui induit celle de gestion de la monnaie de sa valeur par cet état, à propos duquel ils votent, plus ou moins régulièrement, en fonction des Lois qui sont prises par cet état).

Notons que les anglais, en n’adhérant pas à l’euro, ne sont jamais totalement entré en Europe, ce qui n’est pas un scoop.

Indépendamment du fait que l’euro est une monnaie commune et non unique, c’est également une monnaie qui ne repose passur une idée de nation et qui, au contraire, subit la menace de voir des conceptions différentes de l’économie (entre l’Italie et l’Allemagne, par exemple) se cristalliser autour d’elle, tandis que le « libéralisme plus pur » des « anglo-saxons » (en l’occurrence, des Britanniques) retourne dès aujourd’hui plus près de ses racines et s’éloigne de cette Europe à deux vitesse : une pour l’état, une pour les simples citoyens, ce qui heurte frontalement leur système, qui est bien plus proche de celui d’un véritable état de droit, et plus encore leur philosophie « libérale » (au sens décrit par John Locke).

A l’heure où l’Angleterre s’éloigne, il n’est pas inintéressant de noter que l’Europe attaque la version 5 des « DAC » = « Directives on Administrative Cooperation », qui pousse encore un cran plus loin les échanges d’informations entre les pays membres (pour les passionnés patients, il s’agit de la suite de la Directive 2011/16/EU, dont la pleine mesure devra être donnée à partir de 2020).

Les professions telles les banquiers, les assureurs, les avocats, les comptables, … sont à nouveau concernés en première lignes par ce train de mesure, qui sera assorti, d’ailleurs, d’amendes (jusuq’à 250 000 euros ou … 25% du Chiffre d’Affaires des contrevenants).

De quoi s’agit-il ? Mais à la fois de dénoncer tous les « UBO » (UltimateBeneficialsOwners) de sociétés privées ET de déclarer dans le détail les « structures fiscales agressives (« agressive tax planning »), … « structures fiscales agressives » dont il n’existe nulle part aucune définition, puisqu’il devient de plus en plus courant pour les fonctionnaires européens de (1) alourdir l’administratif des sociétés commerciales, surtout celles qui opèrent en lien plus ou moins direct avec le secteur financier, (2) en tentant de les transformer en auxiliaires des Ministères des Finances et (3) en les « responsabilisant » de la façon la plus floue qui soit, c’est—à-dire en fragilisant leur position.

Est-ce bien logique ?

Si l’on considère que la Grande Bretagne, qui représentait 17,2% du budget de l’Union Européenne, s’en va sans qu’un seul fonctionnaire européen (ces gens qui, eux, ne paient à moitié pas d’impôt) n’ait été viré, oui, c’est logique : il faudra bien trouver les ressources quelque part.

Le « KYC » (Know Your Customer) et « l’AML » (Anti Money Laundering) ont certes une importance croissante. Toutefois, quand j’étais petit, le « blanchiment », c’est-à-dire une infraction pénale grave, concernait les armes, la drogue, les putes, … pas la fraude fiscale.

Aujourd’hui, il est clair qu’entre le « RGPD » d’une part, et le traçage sans fin des contribuables, il y a une certaine schyzophrénie de fait, mais une logique économique très claire, très nette et très précise.

Vous souhaitez savoir dans quelles sociétés vos politiciens ont des mandats et combien ils perçoivent ? Pour le deuxième volet, vous repasserez. C’est secret et vous pourrez vous demandez comment, dans ce secteur, des gens sans aucune fortune familiale disposent de patrimoines qui valent entre 5 et 10 millions d’euros, dès 50 ans, sans jamais avoir rien fait d’autre que de la politique. Par contre, et toujours en Belgique, pays à la pointe du progrès en la matière, et après que l’Etat ait promulgué (le 30 août 2018) une Loi par laquelle il déclare que les entités publiques ne devront jamais payer la moindre amende pour quelqu’infraction au RGPD (règlement européen directement applicable, en ce compris aux entités publiques), il est question de rendre accessible à tout un chacun la liste des UBO !?!?

La famille Ferrero, qui s’est précisément installée en Belgique pour échapper aux risques d’enlèvement appréciera très certainement cette position de la Belgique, le tout premier pays à exiger, dès ce mois de novembre, l’identification des UBO.

Que va-t-il se passer ? Lorsque les mafias albanaises ou russes rempliront des avions pour se rendre aux bonnes adresses, consultables en ligne (au contraire de ce que rapporte les mandats publics !), le pays ne risque-t-il pas de se vider de toutes les grosses fortunes qui, à défaut de continuer d’y investir, à tout le moins continuaient d’y consommer ? Indépendamment même du RGPD, précité, la mise en péril de la sécurité des citoyens et résident de ce pays par une mesure aussi irresponsable est en soi choquante !

L’Irlande ne mettra cette directive en œuvre qu’au plus tôt en 2020, tout comme la Hollande (vers laquelle on observe d’ores et déjà des délocalisations de très gros patrimoines), le Luxembourg ayant prévenu qu’il ne rendrait ces listes accessibles qu’à une toute petite minorité d’administrations susceptibles d’être concernées directement par ce type d’information (et encore, peut-être moyennant autorisation).

La Suisse a d’ores et déjà indiqué qu’elle ne mettrait pas à son agenda de réflexion sur ce type de question et l’Angleterre a aussi dit, en marge du Brexit, que sur cette question, ce serait : NON.

Je peux franchement comprendre qu’on puisse être « libéral » ou aimer le libéralisme, et je ne peux que comprendre pourquoi la presse « mass market », financée très largement par des pouvoirs publics qui mettent en branle ce type de logique, ne peut que tapper à coups redoublés sur le « libéralisme » et, par extension, sur des pays « libéraux ». Pour ma part, il me paraît assez flagrant qu’ils sont, à l’instar de la Grande Bretagne, globalement beaucoup plus « justes » et je ne peux qu comprendre qu’ils continuent de rencontrer un certain succès, d’attirer les talents et qu’ils s’éloignent de « nous ».

En attendant, non, nous ne sommes pas dans des pays libéraux, et j’aurais même tendance à constater (et je le déplore) que nos états, qui ne remettent jamais en question leurs dépenses, pas plus que cette Union Européenne qui les chapeaute, mettent en œuvre des moyens de plus en plus coercitifs pour maintenir leur dispendieux train de vie. Non, ce n’est pas juste et je crois que la Grande Bretagne, à nouveau, se comporte en « conscience » de l’Europe, en s’éloignant de celle-ci, ce qu’elle a bien raison de faire.

Que va-t-il se passer ensuite ?

Parfois, certains Britanniques peuvent même en perdre leur flegme légendaire… Et, je le répète : ils ont tellement raison. Let-s stayfriendswiththem, even if itsindividually.

Restons vigilants et n’observons que la réalité : une démocratie, par exemple, n’est pas pacifiste par nature. La France et la Grande-Bretagne, qui étaient les deux plus grandes démocraties du monde au XIXème siècle ont colonisé (militairement) la moitié de la planète, les USA ont envahi l’Irak illégalement, Israël est une démocratie (à ce propos : le ministre de la Défense israélien, Liberman, a démissionné suite à un désaccord sur la réponse à apporter à la tension avec le Hamas, on se rapproche d’élections anticipées), …  En Syrie, les Russes ont là à la demande de Bachar, alors que les « Occidentaux » (= USA + France + Grande Bretagne + Belgique) bombardent de temps en temps sans aucun mandat, ni du pays concerné, ni de l’ONU…  Dans les Westerns, on valorise les génocides (et les génocidaires) et ça nous paraît même sympa, tellement c’est bien fait.

Rambo II : un ancien combattant du Viet-Nam y retourne et tue 75 personnes. Tout le monde applaudit. Je propose un film français dans lequel un ancien combattant d’Algérie y retournerait pour tuer 75 personnes : ça donnerait quoi, à votre avis ? Je parie sur un énorme scandale, et je suis près à parier aussi que les américains ne seraient pas les derniers à nous stygmatiser.

En guerre, on inverse les valeurs : si vous ne tuez pas (celui qui est désigné comme étant) l’ennemi, vous êtes tué par vos compatriotes. Ces temps-ci, la réalité que j’observe, c’est que l’Occident fait la leçon au monde, mais qu’on ne déclare plus les guerres. On y entre, et c’est tout. NB : Dans une guerre déclarée, on est sensé respecter les conventions de Genève et d’autres normes du même genre. Dans des « actes de guerre », par contre, …

De la même façon, nos politiciens nous font la leçon, en matière de transparence, mais font le contraire de ce qu’ils prônent et l’oppression augmente.

A mon sens, ce que j’observe, c’est que nos démocraties sont de moins en moins démocratiques et de plus en plus oppressives. C’est le fait de nos états. Ils ne sont peut-être pas libéraux et, en tous ca,s ils sont de plus en plus injuste, et l’Europe l’est plus encore que ses séïdes. C’est une réalité. Les anglais l’ont vue. Quand est-ce qu’on se décidera à suivre leur lumière ?

Il est vrai que le « Dalaï Lama » (xème Dieu Vivant sur terre choisit de façon pas démocratique du tout, pur régner de façon pas démocratique du tout sur le Tibet) est « citoyen d’honneur de la ville de Paris », c’est-à-dire citoyen d’honneur de la capitale d’une démocratie laïque et tout le monde appalaudit… C’est vraiment bien fait.

Une démocratie n’est pas pacifiste par nature, et elle n’est pas non plus juste par nature, si l’on n’y prend garde.

Et il faut rester vigilant, parce que même là où c’est mieux qu’ailleurs, les dérives anti-démocratiques restent possibles : ainsi, même si le Parlement UK rejette l’accord, juridiquement parlant, May aura la possibilité de continuer à mettre en œuvre le deal. Politiquement parlant, c’est moins sûr.